La stratégie française de réduction des émissions de gaz à effet de serre se traduit par une baisse continue de ces émissions. Cependant, pour atteindre les objectifs à long terme, il est encore nécessaire d’accélérer le rythme de ces réductions.
La France semble progresser dans la réduction de ses émissions de gaz à effet de serre et de polluants. Comme chaque année, le Centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique (Citepa) a publié lundi 5 juin ses données sectorielles pour l’année 2022. Malgré une poussée post-pandémique en 2020, les émissions de CO2e ont de nouveau diminué en 2022 (-2,7 %), pour atteindre un niveau estimé à 403,8 Mt CO2e, hors puits de carbone. Le chiffre global pour 2022 est en amélioration par rapport à celui de la période prépandémique, qui était de 431,1 Mt CO2e en 2019. Cette réduction signifie que le pays respecte son budget carbone, établi à 422 MtCO2e par an, en moyenne, de 2019 à 2023.
La majeure partie de la baisse des émissions (14,7 %) est attribuée au secteur du bâtiment, mais elle doit être considérée avec prudence. Les températures douces de la fin de l’année ont joué un rôle important dans la baisse de la consommation de combustibles fossiles pour le chauffage, en particulier pendant les mois d’avril-mai et d’octobre-novembre. L’industrie manufacturière a également enregistré une baisse de ses émissions totales (6,4 %), ce qui l’a fait passer au troisième rang des secteurs les plus émetteurs. Cette baisse est probablement due aux propres efforts de l’industrie, qui ont pu être motivés par la flambée des prix de l’énergie et une réduction de la production dans certains secteurs tels que les produits chimiques et le ciment. Cependant, il est essentiel de noter que ces progrès ne sont pas uniformément répartis, puisque le sous-secteur de la construction a enregistré une augmentation de 2,4 %, retrouvant ainsi son niveau de 2019.
Poursuivre les efforts
Les émissions du secteur des transports ont continué à augmenter en 2021, avec une hausse de 2,3 % attribuée en grande partie au transport routier et aérien. Toutefois, ces émissions restent inférieures aux niveaux de 2019. Malgré les efforts déployés pour réduire la consommation d’énergie, le secteur de la production d’énergie a connu une augmentation significative des émissions de 4,9 %. Cette hausse peut être attribuée à l’indisponibilité de certaines centrales nucléaires, à l’utilisation accrue de centrales au gaz et au recours temporaire au charbon. Cette augmentation met en évidence la vulnérabilité des modèles actuels. La directrice des programmes du Réseau Action Climat France, Anne Bringault, note que cette légère baisse ne compense pas les retards des années précédentes.
L’évolution des émissions du secteur agricole n’a pas encore été estimée, mais les premières indications suggèrent une baisse. Si le Citepa n’évalue pas l’évolution des puits de carbone, en raison des données disponibles issues des campagnes quinquennales, le ministère français de la transition écologique utilise ces données de référence pour suivre la réduction des émissions de gaz à effet de serre du pays, conformément aux objectifs de sa SNBC. Dans un communiqué de presse, Christophe Béchu, ministre de la transition écologique, a déclaré : “Notre pays tient ses engagements en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre”. Il a également ajouté que cette réduction des émissions repose sur la contribution de tous et la territorialisation des actions nécessaires, ce qui est le sens de la planification écologique. Les données de référence seront définitivement arrêtées à la fin du mois de juin.
Il nous faut continuer sur cette voie pour atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050
Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique
Quelques adaptations à prévoir
Le ministre a reconnu que, malgré les progrès accomplis, le chemin à parcourir reste semé d’embûches. Il a souligné l’importance de poursuivre les efforts pour réduire les émissions de gaz à effet de serre de 50 % d’ici à 2030 et, à terme, atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050. La stratégie nationale à faible émission de carbone (SNBC) prévoit un taux de réduction annuel moyen de 3,3 % pour les années 2024 à 2028, puis de 4 % par an pour les années 2029 à 2033.
Les objectifs actuels, qui étaient basés sur le 4e rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), devront être revus à la hausse puisque les émissions sont désormais calculées sur la base du 5e rapport. Ces objectifs ont également été fixés conformément aux objectifs de l’Union européenne, mais ont depuis été revus à la hausse, passant d’une réduction de 40 % à 55 % entre 1990 et 2030. Le Conseil national de la transition énergétique a récemment fixé un nouvel objectif de 270 Mt CO2e d’ici 2030, ce qui nécessite une diminution annuelle des émissions de 4,1 %, soit 16,7 Mt CO2e par an. C’est le double de l’effort réalisé entre 2019 et 2022.