La course à la production de 40 % de l’énergie européenne à partir de sources renouvelables d’ici 2030 et la prévention d’une pénurie d’énergie croissante nécessiteront une accélération spectaculaire des travaux de construction pour créer des capacités basées sur les énergies renouvelables.
Les projets de construction liés aux énergies renouvelables sont souvent vastes et complexes, et ces projets sont rarement livrés rapidement. Le récent Global Capital Projects Outlook d’InEight a révélé que la proportion de projets de construction européens achevés dans les délais a chuté de 16 % l’année dernière. En fait, en termes de capacité énergétique, seuls onze gigawatts ont été ajoutés grâce à l’achèvement des nouveaux parcs éoliens construits dans l’UE en 2021. C’est peu par rapport à l’objectif de 30 GW supplémentaires par an jusqu’en 2030. Le rythme relativement lent de la construction pourrait faire dérailler l’ambition de l’Europe d’atteindre le “net zéro” et d’améliorer la sécurité énergétique en comblant le vide des importations de combustibles fossiles par des énergies renouvelables nationales.
Le développement des infrastructures énergétiques de l’Europe est entravé par les pénuries de compétences post-pandémiques et les difficultés de la chaîne d’approvisionnement, ainsi que par la spirale des coûts énergétiques et de l’inflation. Les risques non gérés ou inattendus sont désormais cités comme le facteur le plus important pour déterminer si les projets d’investissement en Europe sont achevés à temps et dans le respect du budget.
Des solutions logicielles déconnectées
Une partie du problème est due à une chaîne de valeur de la construction disjointe et disparate, avec un éventail de solutions logicielles déconnectées, des modèles de livraison de projet cloisonnés, une identification des risques inadéquate et des méthodes de mesure de l’avancement inexactes. Par exemple, l’avancement du projet est souvent mesuré manuellement à l’aide de feuilles de calcul sans “règles de crédit” convenues au préalable, ce qui laisse au maître d’ouvrage une vision incomplète de ce qui a réellement été fait et, surtout, de ce qui reste à faire.
Les mécanismes contractuels de construction tendent vers des approches plus itératives et collaboratives telles que la conception-construction et la livraison progressive, mais de nombreux propriétaires s’appuient encore sur l’approche traditionnelle et linéaire de la conception, puis de l’appel d’offres, puis de la construction. Les approches itératives et les modèles de partage des risques peuvent être beaucoup plus efficaces, plus transparents et tendent à absorber plus facilement les changements afin que le travail soit effectué plus rapidement – et avec moins de litiges – ce qui minimise les effets d’entraînement sur les autres projets en attente. Malheureusement, la recherche d’une collaboration plus étroite et d’une visibilité en temps réel pour soutenir ces modèles de collaboration exerce une pression intense sur l’ensemble des outils propriétaires et des solutions ponctuelles actuellement utilisés dans le secteur. Il en résulte un cloisonnement des données entre les partenaires du projet, la mauvaise communication entre les parties prenantes étant considérée comme le deuxième facteur de retard et de dépassement des coûts des projets en Europe.
Il est urgent de numériser et d’intégrer les méthodes de construction pour permettre une exécution standardisée, agile et accélérée des projets. L’abandon des solutions ponctuelles au profit de plateformes de gestion de projet intégrées et de technologies de construction interopérables pourrait favoriser des modèles de réalisation de projets plus intégrés et adaptables. Les plateformes ouvertes et l’intégration des systèmes de gestion de projet pourraient permettre une visibilité en temps réel de l’évolution des dates de livraison afin d’accélérer les taux d’achèvement des projets.
De même, ces plateformes facilitent la mise en œuvre de mesures cohérentes de gestion de la valeur acquise afin de comparer automatiquement et en temps quasi réel les progrès réalisés par rapport aux plans dans l’ensemble des projets, ce qui permet aux parties prenantes d’identifier et d’atténuer rapidement les problèmes, plutôt que de réagir à un rapport de fin de mois.
Connecter les données dans la construction
Les systèmes modernes de contrôle de projet basés sur des normes et fonctionnant dans le cloud prennent en charge des méthodes de livraison de projet intégrées où toutes les parties prenantes supervisent et accélèrent en collaboration chaque étape du développement et de l’exécution du projet. La connexion des données entre les différentes étapes du cycle de vie du projet, entre les rôles et entre les parties prenantes peut également permettre d’adopter des approches fondées sur les données qui exploitent les données des projets antérieurs afin d’informer la planification des projets futurs.
Grâce à la combinaison de l’intelligence artificielle et de l’intelligence humaine, il est possible de mettre en œuvre un processus de planification qui s’adapte continuellement aux risques, en veillant à ce que des attentes réalistes soient fixées au moment de l’approbation du financement et tout au long de l’exécution des travaux de conception et de construction.
L’intégration de données passées et présentes sur les projets permet aux entreprises de comparer les estimations et les calendriers actuels aux résultats historiques, tels qu’ils ont été construits, ce qui permet de valider le plan ou d’identifier les zones de risque à explorer. Une telle approche permet également de raccourcir le temps de montée en puissance du nouveau personnel, en particulier celui qui est moins expérimenté, car elle lui permet de tirer parti des connaissances collectives et des enseignements tirés des projets précédents.
La demande de construction accélérée à travers l’Europe influence une mise à niveau fondamentale des modèles et systèmes de construction actuels de l’Europe. Il s’agit essentiellement d’abandonner les modèles de livraison de projets fragmentés et linéaires et les systèmes logiciels cloisonnés au profit de modèles intégrés, dynamiques et axés sur les données, où les risques sont surveillés en permanence et gérés en collaboration par toutes les parties prenantes.