Comme d’autres types de structures, les établissements de santé tels que les hôpitaux, les cliniques et les maisons de retraite ne sont pas à l’abri de la crise énergétique qui se caractérise par l’augmentation soudaine des prix de l’énergie, ainsi que par le risque potentiel de coupures de courant. Il est donc essentiel de mettre en œuvre un système de gestion des bâtiments (GTB) efficace, adapté aux besoins spécifiques de ces établissements et de leurs utilisateurs, notamment les patients et le personnel soignant.
Les établissements de santé, comme les autres bâtiments tertiaires, sont confrontés à de nouvelles contraintes légales telles que la directive BACS (Building Automation and Control Systems), ainsi qu’à des contraintes économiques dues à l’augmentation soudaine des dépenses énergétiques. Ces restrictions interviennent dans un environnement financier précaire.
Spécificité du secteur de la santé
Ces établissements sont confrontés à des défis uniques que ne rencontrent pas les immeubles de bureaux ou de vente au détail. Il s’agit notamment de gérer des sites étendus où se côtoient des bâtiments anciens et récents, d’accueillir un large éventail de pièces telles que des salles techniques, des chambres de patients et des salles complexes comme des salles d’opération, des salles d’imagerie médicale (IRM, scanner) ou des salles de traitement de données. En outre, la demande en eau chaude est élevée, avec une moyenne de 120 litres par jour et par lit dans un hôpital, et la nécessité de températures de consigne élevées pour prévenir la propagation de la légionellose. Le confort et la sécurité des patients et du personnel soignant sont également de la plus haute importance, ce qui nécessite un contrôle minutieux des installations CVC et des générateurs avec des points de consigne de température élevés pour répondre aux besoins d’un public fragile. De plus, les besoins en refroidissement sont plus importants dans ces établissements que dans d’autres bâtiments tertiaires, notamment dans les laboratoires ou les salles d’opération. Enfin, le contrôle de la qualité de l’air et de l’eau est essentiel au maintien d’un environnement sûr et sain.
Alain Tenoux, Directeur Général Bâtiments et Structures Complexes d’Equans France, affirme que pour accompagner le secteur de la santé face aux défis des transitions énergétiques, industrielles et numériques, il est nécessaire d’utiliser un ensemble de compétences complémentaires. C’est essentiel pour créer, exécuter, pérenniser et améliorer des solutions spécifiquement conçues pour répondre aux besoins de l’industrie de la santé. Les soins de santé sont un secteur où la moindre erreur ou approximation ne peut être tolérée, car la vie humaine est en danger. C’est pourquoi différents domaines d’expertise tels que le génie climatique, le chauffage, la ventilation, la climatisation, les blocs opératoires, l’air sain, l’électrotechnique, le secours électrique, la vidéosurveillance, le contrôle d’accès, les alarmes anti-intrusion, la sécurité incendie, la gestion des bâtiments, la GTB, l’hypervision, l’analyse de données, le Smart Hospital, l’AMO BIM, le jumeau numérique, la robotique, les réseaux intelligents, les infrastructures informatiques, les réseaux audiovisuels, mobiles et Wi-Fi, les serveurs, la performance environnementale, les matériaux biosourcés et l’immobilier à faible émission de carbone se complètent pour relever les défis du secteur.
Relever les défis avec un GTB optimisé
La gestion efficace des fonctions techniques telles que la climatisation, la ventilation, le chauffage, l’alimentation électrique, la gestion de l’éclairage et le traitement de l’air est essentielle pour réduire la consommation d’énergie des bâtiments et des équipements. Bien que de nombreux bâtiments soient déjà équipés de systèmes de gestion des bâtiments (GTB), l’utilisation des technologies numériques et la numérisation des équipements peuvent encore améliorer leurs performances et leur potentiel d’économies.Jérémy Mégrier, directeur adjoint du département AEE d’Axima au sein de la société Equans Digital, spécialisée dans la fourniture de solutions personnalisées pour optimiser l’utilisation des équipements techniques et améliorer les bâtiments, explique le processus permettant de répondre aux besoins spécifiques des établissements de santé. La première étape consiste à élaborer une solution technique qui réponde aux besoins du client, en intégrant les normes et réglementations relatives à la santé, à la sécurité et à l’efficacité énergétique. Les hôpitaux, en particulier, sont soumis au décret BACS, qui impose l’installation d’une GTB. En tant qu’intégrateur, le rôle d’Axima est de sélectionner les fabricants appropriés et de mettre en œuvre la GTB. Cependant, les hôpitaux ont installé des GTB avant même l’entrée en vigueur du décret, principalement pour assurer la sécurité et le confort des patients en maintenant la température, la pression, le taux d’hygrométrie et la qualité de l’air.
Selon Justin Passaquet, directeur régional des ventes pour Distech Controls, les hôpitaux ont été parmi les premiers marchés verticaux à adopter les systèmes de GTB il y a environ 30 à 40 ans. Les hôpitaux, qui sont à la pointe de l’innovation, cherchent constamment à s’améliorer et à gagner de petits points de consommation. Pour ce faire, les hôpitaux peuvent compter sur les CEE pour financer une partie de leurs travaux. Cependant, le cycle de vie des systèmes de GTB dans les hôpitaux n’est que de 10 à 15 ans, car les progrès technologiques et l’évolution des exigences des opérateurs et des occupants rendent les anciens systèmes de GTB obsolètes. Par exemple, les parcours des patients ont changé et les anciens protocoles ne peuvent plus répondre aux attentes des opérateurs hospitaliers qui veulent garantir l’efficacité énergétique et faire communiquer leurs systèmes avec d’autres systèmes techniques pour la maintenance, le signalement d’incidents et la cybersécurité. La rénovation des systèmes de GTB dans les hôpitaux doit également répondre aux attentes du personnel soignant, comme les chirurgiens, qui ont besoin d’une gestion de la température, d’une désinfection de l’équipement ou d’une décontamination. Il est très difficile d’économiser sur le chauffage, la ventilation et la climatisation dans les hôpitaux, et même une réduction de 5 à 10 % est difficile à atteindre. Cependant, les hôpitaux peuvent réaliser des économies en gérant l’intermittence de l’éclairage dans les chambres ou en gérant les coupures d’électricité.
Des outils spécifiques à l’hôpital
Les systèmes de GTB contiennent une fonction de contrôle et d’évaluation de la consommation d’énergie grâce à des capteurs et à la supervision de l’installation. Cela inclut des produits ou des systèmes, tels que des régulateurs et des actionneurs, qui peuvent ajuster les systèmes techniques pour assurer un confort maximal avec une consommation d’énergie minimale, en utilisant les technologies numériques recommandées par les fabricants. Cette fonction permet de mesurer et de contrôler la consommation d’énergie par zone fonctionnelle, comme la réception, les chambres, les salles d’opération, les locaux techniques et les laboratoires.Un nouveau logiciel de supervision assurera l’interopérabilité des données avec des normes de sécurité élevées. Le contrôle des équipements permet de réduire la consommation d’énergie en cas de besoin, de se prémunir contre les incidents techniques et les pannes, et d’assurer une maintenance en toute sécurité.
Valentin Loiseau, chef de projet GTC/GTB Automation pour le département AEE d’Axima chez Equans Digital, explique la solution IP proposée, basée sur la facilité de mise en œuvre et la nouveauté technologique, pour un hôpital tropical en phase finale d’achèvement. La solution ECLYPSE de Distech Controls a été utilisée pour la gestion des locaux techniques (production de chaleur et de froid, centrales de traitement d’air) et du confort des terminaux. L’hôpital compte près de 2 500 régulateurs installés, soit l’équivalent d’une tour de La Défense.
Gestion de l’énergie open source
Les nouvelles solutions de gestion de l’énergie rendues possibles par l’IdO utilisent des plateformes numériques ouvertes et flexibles. Ces plateformes peuvent s’adapter à de nouveaux appareils et technologies et exploiter des données provenant de différents systèmes. Ces solutions sont facilement évolutives et peuvent prendre en charge les salles d’opération, les unités de soins intensifs ou de nouveaux services hospitaliers en cas de situation critique.Schneider Electric propose des solutions telles que PME, une solution de reconfiguration automatique des boucles HTA, et des architectures électriques sécurisées et redondantes, qui rendent les établissements de santé plus résilients et plus efficaces. Les solutions de gestion des bâtiments telles que l’EBO sont nécessaires pour réduire la consommation d’énergie tout en maintenant le confort des patients, en particulier avec l’augmentation des coûts de l’énergie. La mise en œuvre de cette solution présente un retour sur investissement significatif, et le bâtiment de soins de santé devient plus durable.
La solution EcoStruxure Building Advisor fournit des services qui améliorent la performance opérationnelle du système de gestion des bâtiments de santé. La solution surveille en permanence les systèmes tels que le débit d’air, la pression et l’hygrométrie des salles d’opération et de réveil afin de fournir des informations clés sur les opérations et l’utilisation du bâtiment. Elle détecte de manière proactive les anomalies techniques et résout les problèmes d’inefficacité dans le processus hospitalier.
Pour éviter les temps d’arrêt liés à l’analyse des défaillances et parvenir à une détection précise et proactive des problèmes, la maintenance des installations HVAC est essentielle. EcoStruxure Facility Expert est une solution qui simplifie et améliore les opérations de maintenance dans les services d’exploitation des établissements de santé. Les processus et les équipements de l’hôpital sont ainsi plus fiables et plus sûrs. En cas de détection d’une défaillance, l’alerte est immédiate, ce qui garantit une continuité optimale du processus hospitalier.
Schneider Electric a installé des solutions modernes et un système de supervision appelé “Power Monitoring Expert” au CHU de Lille pour améliorer son alimentation électrique, la rendre plus fiable et la surveiller efficacement. Le système PME collecte et traite les données relatives à la surveillance de l’énergie, telles que le taux de charge, le courant, la puissance et les harmoniques, pour chaque bâtiment. Avec 3 300 lits, 500 000 m2 de surface et 12 hôpitaux sur un seul site, il s’agit d’une tâche importante pour le centre hospitalier universitaire. Wilfrid Descamps, chef du service maintenance, infrastructure et exploitation de l’établissement, souhaite mener des études pour comprendre et traiter les anomalies, analyser les consommations et maîtriser l’ensemble grâce à un suivi énergétique réel.Caroline Moniez, responsable marketing et communication chez Arc Informatique, explique qu’une plateforme ouverte comme PcVue Solutions, construite autour de protocoles ouverts, tels que LonWorks ou BACnet, est flexible, fiable et fournit une plateforme multi-services qui permet de superviser et d’opérer différents sous-systèmes au sein d’une seule et même plateforme. L’hyperviseur fournit une plateforme permettant d’harmoniser les données provenant de différents systèmes et de les convertir en informations pertinentes pour l’opérateur. Les opérateurs auront accès à des informations en temps réel et contrôleront les différents systèmes et services techniques du bâtiment à l’aide d’une interface unique et interactive.
Toutes les données collectées doivent être stockées dans une base de données ouverte de type SQL Server qui peut être utilisée par d’autres systèmes tiers pour l’extraction de statistiques dans des fichiers Excel, l’édition de rapports et de bilans, ou la visualisation du suivi des courbes. Cet hyperviseur doit permettre le suivi des consommations et la mesure des données archivées liées aux compteurs et sous-compteurs comme l’éclairage, l’eau, l’électricité, le gaz et l’eau chaude.